Le string est partout. Il s’affiche sur tous les fessiers, qu’ils soient féminins ou masculins, bombés ou bio-dégradés. Incarnant théoriquement une volonté de discrétion et de transparence, il sort facilement de ses gonds, jupes, jupons et pantalons. On le soupçonne d’avoir convaincu des stars (Mike Jagger ?), on le remarque sur les plages, on l’utilise dans les pubs… Il reflète une époque sens dessus dessous, métaphorise l’ambiance sociale – tendue comme un string – rappelle le triomphe du limité sur les idées larges…
Se pencher sur la question du string n’est pas simple, on est exposé à en voir de toutes les couleurs. Un premier constat s’impose : entre le string et le Tanga, la frontière est mince. Ca se joue à quelques centimètres de tissu et il faut savoir choisir son camp. Pour les femmes, un Tanga est à mi-chemin entre la culotte et le string. Pour les hommes, le Tanga est beaucoup plus proche du slip que du string. Ce premier point éclairci, il s’agit d’aborder le sujet avec finesse…
L’histoire commença au Danemark, il y a près d’un quart de siècle. Anne Pasquier était une mère de famille qui enfilait comme d’autres des pantalons légèrement moulants, vêtements qui caressaient les courbes de la femme et en suggéraient délicatement les rondeurs. Une sensualité que les élastiques tranchants de la culotte auraient mis à mal. La fondatrice de la maison Aubade obtempéra dans un souci de commodité au port utile, quoique disgracieux de la gaine.
A l’occasion d’un lèche vitrine, elle se retrouva au fond d’une boutique de danse, où pendaient quelques «ficelles». La gaine pouvait aller se rhabiller ! Le string, plus pratique, venait de prendre sa place et apparaissait pour la première fois en 1975 dans une collection de lingerie française.
Malheureusement, le string fit vite menacé par le mouvement féministe de l’époque. Ce dernier refusait le côté avilissant de cette lingerie pourtant si pratique.
Le string mis à mal par ces idées fut relayé au rang d’objet tabou . Cet objet si décrié fut récupéré par les prostituées qui en l’adoptant en firent un objet de désir. Les années passèrent, et avec elles les mœurs… Tant et si bien que ce symbole de l’interdit devait absolument être récupéré.
La mode s’en chargea, comme elle l’avait fait auparavant. Le string devint l’accessoire qui, au milieu des années 1980, consacra le retour de la lingerie. Voilà qui fut, selon Farid Chenoune dans «les Dessous de la féminité. Un siècle de lingerie», «l’entrée des artifices de la femme légère dans le foyer conjugal». Sortie de l’ombre par Chantal Thomass, la ficelle sexy fit son entrée dans la mode par la grande porte, se trimbalant sous les lumières reconnaissantes des podiums de la haute couture. «La frontière s’efface [alors] entre la sexualité sans désir ni jouissance de l’épouse mère et l’érotisme expert de la prostituée», poursuit Farid Chenoune.
Ainsi les dessous prirent-ils le dessus. Il s’agissait désormais de défier le regard de l’autre, de plaire, parce que la femme libre et moderne entendait assumer son corps. En le montrant. «Les messages publicitaires parlent d’une lingerie qui émancipe, d’une lingerie source de féminité accomplie, explique Vincent Duclert dans un article pour la revue « Clio ». […] Ce discours sous-entend des pratiques féminines de choix, d’initiative, de séduction qui passeraient par toute une stratégie, consciente, sensuelle et intellectuelle dans la lingerie.» Au milieu des années 1980, les Dim-Up – ces bas qui tiennent tout seuls –, les push up -soutiens-gorge pigeonnants- triomphent. Il s’agit d’une montée en puissance des femmes qui affirment non seulement leur égalité dans l’initiative amoureuse mais surtout leur indépendance sexuelle .Dès 1993, ce sont elles qui donnent des «Leçons de séduction» par la voix d’Aubade. C’est une poitrine pulpeuse et rebondie qui s’affiche dans les rues pour professer la «Leçon numéro 1: lui offrir un peu d’ivresse». Pas de tête sur cette image en noir et blanc… «Mais une femme qui a de l’esprit, explique-t-on chez Aubade. Pas une femme-objet, mais une femme-femme qui invite au jeu. Ce n’est pas la personne que l’on vend, mais un produit, et le désir qu’il suggère.»
Aujourd’hui, le string est entré dans les mœurs. Il ne cache plus, et s’exhibe au dessus du pantalon taille basse, sur les hanches mises à nues par des tops moulants s’arrêtant au dessus du nombril. Certaines stars américaines sont même allées jusqu’à le montrer sur leur pantalons et autres shorties.
Bien que le string ait perdu sa fonction pratique, il est devenu un accessoire symbole de féminité. Aujourd’hui les modèles se multiplient, à côté du string classique ou du string ceinture (plus échancré), le string anneau (qui se dégrafe sur le côté), le string fermeture éclair, le string à lacet, le string résille, le string transparent, le string maille… se retrouvent dans les collections.
Côté hommes, c’est la marque Scandale qui donne le coup d’envoi du string et du slip sexy pour hommes, bientôt suivie par Dim ou Athena.